Le chef du gouvernement vient de signer un décret qui proroge l’état d’urgence sanitaire au 10 juillet, avec des mesures d’allègement du confinement laissées à l’appréciation discrétionaire du ministre de l’intérieur et ses walis et gouverneurs.
Cela démontre tout d’abord sur le plan constitutionnel et institutionnel, que les preneurs de décisions s’emmêlent lamentablement les pinceaux, puisqu’ils confondent état d’urgence (mesure exceptionnelle non prévue par la constitution), mais qui est clairement du ressort du pouvoir législatif puisqu’elle restreint les libertés individuelles et droits fondamentaux, avec l’état d’exception et se sont mis à attribuer à des membres du gouvernement tel le ministre de l’intérieur des pouvoirs dévolus au chef du gouvernement, toujours au nom de la sécurité sanitaire collective.
Ensuite, cette prorogation est tout simplement, pour le moins, irresponsable économiquement et socialement.
Elle va certainement porter le coup de grâce aux petits et moyens opérateurs suffocants qui vivotaient tant bien que mal avant la crise, aux professionnels libéraux de petite taille qui joignaient difficilement les deux bouts, ainsi qu’à de larges pans de la société marginalisés et paupérisés depuis toujours, mais définitivement condamnés à la déconfiture maintenant.
Socialement, elle prolongera la souffrance injustifiée de millions de familles, assignées à résidence dans des taudis insalubres, vivant toujours dans la misère mais qui trouvaient jusque-là des moyens simples pour égayer un quotidien pénible. Les méfaits des phobies, de l’obésité, des maladies cardiovasculaires, des dépressions, des violences conjugales, des incestes, et des criminalités de tous genres seraient inéluctablement de loin beaucoup plus néfastes que les quelques décès dûs à la pandémie.
Les frictions entre les forces de l’ordre et les citoyens deviendraient inexorablement plus fréquentes, les abus d’autorité, les violences policières et les détentions abusives deviendraient monnaie courante et la paix sociale dont on cherche à tout prix la préservation serait menacée.
Enfin, cette décision peu éclairée démontre une légèreté répréhensible et une improvisation totale du gouvernement, voire un amateurisme basique. Aucune vision prospective, aucune stratégie de déconfinement, pas le moindre rapport scientifique sérieux sur la gestion de crise, avec ses étapes et ses normes de risque management, son coût socio-économique, le risque de menace à l’ordre public, l’approche de benchmarking, les solutions, les alternatives, etc.
Rien. Zéro. Que dalle ! Basic Instinct !
N’a-t-on pas de virologues dans le pays qui viendraient expliquer scientifiquement ce qui se passe, aux Marocains ? au lieu de faire lire des communiqués télégrammes à la télé ? Pour leur dire que ce n’est pas la peste, ni la grippe espagnole, et qu’il faut se contenter de prendre les mesures de prévention et de protection usuelles, sans sombrer dans l’hypocondrie et l’autodestruction. En France, quand Macron a rendu visite au Professeur Raoult le 9 avril, il a tout appris du virus. Il s’est fait sa religion. En rentrant à l’Élysée il a annoncé que le 11 mai serait date de déconfinement. Malgré les reproches du conseil de la Santé. C’est la science crue par la politique légitime qui gouverne. Gouverner, c’est prévoir !
N’a-t-o-n pas d’économistes qui peuvent être consultés par le gouvernement des pantouflards, des oligarques, des ploutocrates et des rentiers pour leur dire qu’ils précipitent le pays dans l’inconnu ?
N’a-t-on pas de constitutionnalistes pour dire halte aux violations répétées de la constitution ?