A Tafilalet, la pollinisation traditionnelle des palmiers rime avec les techniques modernes

Journalinfo
Du haut de ses 60 ans, Lahcen Ouaanaya grimpe le tronc rêche d’un palmier-dattier pour exécuter avec tant d’expertise, d’agilité et de vigilance cette opération ancestrale de pollinisation manuelle des inflorescences femelles.

 

En cette période de l’année, les agriculteurs de la région de Drâa-Tafilalet procèdent à la pollinisation des palmiers-dattiers (Phoenix dactylifera), ce cultivar dioïque composé de pieds mâles (Dokkars) et de pieds femelles (Nakhla).

 

 » L’opération consiste à appliquer le pollen en attachant des épillets mâles avec les spathes femelles du palmier-dattier « , explique Lahcen à la MAP, notant que  » l’on s’assure que le nombre des épillets mâles introduits au cœur des spathes soit, selon les traditions, un chiffre impair « .

 

Cet agriculteur de la commune d’Aoufous (province d’Errachidia), a pu acquérir au fil des ans un savoir-faire traditionnel de pollinisation des palmiers, qui constitue une opération cruciale permettant aux agriculteurs d’avoir une importante production dattière, aussi bien en quantité qu’en qualité.

 

Pour Lahcen l’âge n’est qu’un chiffre. Cet agriculteur qui a maîtrisé ce procédé traditionnel de pollinisation dès son plus jeune âge, arrive à grimper agilement des palmiers dont la hauteur dépasse les quinze mètres.

 

 » Jadis, les personnes chargées de la pollinisation des palmiers se payaient en nature. De nos jours, la rémunération se fait souvent en argent en fonction du nombre d’arbres pollinisés « , a-t-il dit.

 

 » La pollinisation est une tâche ardue et épuisante qui requiert tant de prudence « , nuance Lahcen qui précise que le nombre de palmiers traités par jour dépend de la hauteur de l’arbre, de la quantité des régimes à polliniser et du nombre des branches et des palmes sèches à nettoyer avant l’escalade de l’arbre.

 

En fait, Lahcen veille à la préservation des rituels de pollinisation traditionnelle des palmiers mais aussi à la transmission de ces techniques ancestrales aux jeunes agriculteurs de la région à l’image de Yassine Ouhmouch.

 

« Naturellement, le vent et les insectes sont des éléments qui assurent la fécondation des pistils, mais ces deux vecteurs n’ont qu’un effet limité d’où la nécessité de recourir à la fécondation artificielle « , explique Yassine.

 

Selon lui, le processus de pollinisation commence par la collecte du pollen mûr auprès des palmiers mâles, avant de nettoyer les arbres et d’appliquer avec soin cette substance fécondatrice sur les inflorescences femelles au moment où leur couleur commence à passer du blanc au verdâtre.

 

Il a, par ailleurs, mis en avant le programme national de nettoyage des touffes de palmiers, mis en œuvre par le ministère de l’Agriculture, visant l’entretien régulier des palmiers, et partant lutter contre les incendies et améliorer le rendement de cet arbre.

 

Si Lahcen Ouaanaya comme d’autres agriculteurs à Tafilalet, œuvrent à maintenir vivante cette tradition ancestrale, d’autres agriculteurs optent pour des techniques plus modernes leur permettant de gagner assez de temps et de coûts dans le traitement de leurs palmiers.

 

Au niveau des exploitations agricoles modernes situées sur l’axe Meski-Boudnib, les spadices femelles sont fécondés à l’aide de pollinisateur composé d’une poudreuse à main et d’une perche télescopique de plusieurs mètres de long.

 

D’autres agriculteurs font appel à des drones qui assurent un traitement beaucoup plus rapide que les méthodes conventionnelles. En fait, le recours aux drones assistés par des systèmes d’intelligence artificielle facilite les travaux de pollinisation, et permet de gagner en temps étant donné que la fécondation d’un arbre ne prend qu’environ 15 secondes, contre plus de 15 minutes pour les méthodes traditionnelles.

 

A Drâa-Tafilalet, principale région contribuant avec près de 80% à la production nationale en dattes, des efforts soutenus sont constamment déployés pour promouvoir la filière phoénicicole. Le ministère de l’Agriculture, de la Pêche Maritime, du Développement Rural et des Eaux et Forêts avait lancé un ambitieux projet de planter 5 millions de palmiers d’ici 2030, parmi des variétés spécifiques adaptées au contexte climatique.

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